01/01/2021



Rosa Bonheur


Elle s’élève sur un parterre de fleurs. Elle embrasse de son regard l'un des plus beaux jardins à l'anglaise, non pas d’outre-Manche mais en France. Son nom exhale un parfum d’extase et de félicité. Au cœur du Jardin public, à Bordeaux, trône la statue de Rosa Bonheur. Laissons la ville de Bordeaux en dresser son portrait : « Rosa Bonheur (1822-1899), artiste peintre et sculptrice bordelaise, a connu la célébrité de son vivant. Ses deux tableaux les plus connus Le labourage Nivernais (Musée d’Orsay) et son chef-d’œuvre Le marché des chevaux (Metropolitan Museum de New York) l’ont placée au premier rang des peintres de son temps. Personnalité féministe engagée, éprise de liberté et d’indépendance, elle a été la première femme artiste a être élevée au titre de chevalier de la Légion d’honneur en 1865. Cette sculpture a été réalisée en 1909-1910 par le sculpteur bordelais Gaston Veuvenot Leroux. » 

 

Récemment restaurée, la statue de Rosa Bonheur a retrouvé son lustre ancien. Longtemps recouverte de mousses et lichens, sa palette de peinture brisée, la sculpture brille désormais de mille feux dont les flammes sont loin d’être une simple métaphore. Car le miracle d’une rencontre advint, celle de l’éther et de la lumière.



Durant les mois d’été, comme attirés par la palette du peintre, des rayons de soleil viennent frapper sa surface, s’y réfléchissent et retournent vers les cieux. Lumière blanche sur palette blanche. Quelques gouttes de pluie suffiraient à en décomposer le spectre lumineux pour qu’apparaissent tel un arc-en-ciel, du rouge, orange, jaune, au vert, bleu, indigo et violet comme autant de taches de peinture à l’huile sur une palette de peintre. Mais les mois ont passé. Les fleurs fanées, le virus à couronne ragaillardi, le soleil s’en est allé et cet hiver, le mur des arcades situées derrière la statue s’est couvert d’autres lumières... graphomanes et graffiti. 

 

Un murmure de derrière les fagots sourd. Rapprochons-nous. Lévitons quelques instants ou pour les moins crédules, faisons semblant de nous mouvoir derrière Rose. Peu à peu pénétrant l’arrière plan, les contours d’une voix se précisent. On dirait la voix d’une muse, Calliope à moins que cela ne soit plutôt la muse de la poésie lyrique et érotique, Érato, qui pointe son nez grec bien qu’un chouïa retroussé. À peine l’a-t-on entendue qu’elle s’est déjà évanouie. Des traces écrites sur le mur en ont conservé le souvenir. Serait-ce une ode au féminisme précurseur de Rosa Bonheur ? Ou bien un écho adolescent à une autre rose, fleur suave ou bouton de rose d’un autre épineux ? Celui de Rrose Sélavy ? Rose is a rose is a rose is a Rrose.






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