Le tapuscrit qui valait 750
milliards
- SENSITIVE NARRATIVE
MATTERS -
“PART FOUR - FINDING,
DISCUSSION AND NARRATIVE REGARDING CERTAIN SENSITIVE NATIONAL SECURITY MATTERS”
Le Codex Leicester de Leonardo da Vinci fut
vendu en 1994 pour la somme de 31 millions de dollars (49 millions de dollars
en prix ajusté). Il s’agissait bien entendu d’un écrit manuscrit (par nature unique). Vingt-deux
ans plus tard, en 2016 ce record est sur le point d’être battu. Il est ici
question d’un tapuscrit (par essence multiple) d’une valeur de 750 milliards de dollars. L’Arabie
Saoudite s’inquiète de la publication d’un document de vingt-huit pages dont le
titre tout de majuscules vêtu s’épelle : “PART FOUR - FINDING, DISCUSSION
AND NARRATIVE REGARDING CERTAIN SENSITIVE NATIONAL SECURITY MATTERS”. On
appréciera à sa juste valeur littéraire pareille proposition qui relie le récit
(the narrative), le sens de la
découverte (the finding) et le
caractère sensible (sensitive),
délicat de l’affaire.
Cette
valeur littéraire est d’autant plus remarquable que je découvris ce titre pour
la première fois retranscrit de manière possiblement erronée. Merveilleux lapsus, ou du moins est-il permis de le penser. “Saudi Arabia, 9/11, and what we know about
the secret papers that could ignite a diplomatic war”, tel était l’article
qui m’enduisit d’erreur. Dans cet article de The Independent, l’expression NATIONAL SECURITY MATTERS (les questions
de sécurité nationale) avait été remplacée par NARRATIVE MATTERS (le questionnement
du récit ou narratologie). Ainsi le titre se lisait-il : “PART FOUR -
FINDING, DISCUSSION AND NARRATIVE REGARDING CERTAIN SENSITIVE NARRATIVE MATTERS”.
Merveilleux lapsus qui du côté littéraire vaut son pesant d’or et d’or il est
question.
“Saudi Arabia, 9/11, and what we know about the
secret papers that could ignite a diplomatic war”, article de Kim Sengupta, Diplomatic Editor, The
Independent.
Ces vingt-huit
pages qui inquiétent l’Arabie Saoudite font partie d’un rapport
rédigé en 2002 suite aux attaques terroristes du 11 septembre Ce rapport fut
publié par la commission permanente du Congrès dédiée à la surveillance de agences
du renseignement américain : “REPORT OF THE JOINT INQUIRY INTO THE TERRORIST
ATTACKS OF SEPTEMBER 11, 2001” (U.S. Government Publishing Office, 2002, 838
pages).
Les vingt-huit
pages mystérieuses ont été classées “secret défense” dès la parution de l’ouvrage
pour cause de sécurité nationale. Le site 28Pages.org
présente les réactions stupéfiées de plusieurs personnalités politiques à la
lecture de ces pages classées Top
Secret :
Walter
Jones, élu à la Chambre des représentants : “I
was absolutely shocked by what I read. […] It was 28 pages and it probably took
me a good hour and a half because I would have to re-read certain parts of it
that I just couldn’t believe what I was reading.”
Thomas
Massie, élu à la Chambre des représentants : “I went into the soundproof, secret room here in Congress and read
those 28 pages. And it was a really disturbing event for me to read those. I
had to stop every two or three pages and rearrange my perception of history.
Un
responsable politique qui a préféré garder l’anonymat : “If the 28 pages were to be made public, I have no question that the
entire relationship with Saudi Arabia would change overnight.”
Lu depuis le bunker sécurisé
du Congrès (the soundproof, secret room),
ce texte modifierait notre perception de l’histoire. Certains membres du
Congrès souhaiteraient ainsi que les vingt-huit pages du rapport soient
déclassifiées et que les familles des victimes du 11 septembre aient accès à
ces informations (deux-mille-neuf-cent-soixante-dix-sept personnes périrent et
plus de six-mille furent blessées). La parution de ce texte pourrait déboucher
sur un vote explosif au Congrès. Rappelons que quinze des dix-neuf terroristes
étaient en possession d’un passeport émanant d’une monarchie absolue de droit
divin régie par la dynastie saoudienne de la famille des Al Saoud. Un
projet de loi est à l’étude visant à lancer des poursuites contre l’Arabie
Saoudite si ce pays était effectivement impliqué dans les attentats du 11
septembre. L’ordre du jour est à
l’escalade. Le “gouvernement” saoudien a menacé de vendre pour 750 milliards de
dollars d’actifs américains si le Congrès décidait d’approuver cette loi. 750
milliards de dollars pour des informations contenues dans le petit livre des
révélations.
750
milliards de dollars pour vingt-huit pages équivaut à un montant de 26,7
milliards de dollars la page. En comptant environ quatre-cent-vingt mots par page,
on obtiendrait 63 millions de dollars le mot, soit 1,2 millions le caractère
(espaces compris) ou 1 million le caractère (sans espaces). La soustraction des
valeurs “espaces compris” et “sans espaces” nous donnerait alors la valeur de
l’espace, du blanc, du vide, qui sépare les mots. 200 000 dollars l’absence de
toute chose. “Sensitive” — dites-vous. Very
SENSITIVE isn’t it ?
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